La connerie dans l’entreprise
Un récent numéro de l’excellente Revue ‘’Sciences Humaines’’, sous la direction de Jean François Marmion, s’est penché sur la psychologie de la connerie. ‘’Vaste sujet’’, aurait dit le Général de Gaulle, qui a donné lieu déjà à une abondante littérature scientifique.
Bien sûr, on peut être intelligent, brillant… et con.
En entreprise, on visera ‘’le crétin organisationnel’’ : celui qui complique inutilement ce qui pourrait être simple, refuse la coopération, n’écoute pas, et met son ego avant le collectif en ignorant systématiquement le point de vue des autres. Ce qui renvoie à un déficit d’intelligence émotionnelle et d’empathie.
Le con se distingue souvent par un effet de surconfiance (effet Dunning- Kruger): moins il est compétent, plus il tend à se surestimer. Michel Audiard l’avait résumé dans Les Tontons flingueurs : ''Un con, ça ose tout. C’est même à ça qu’on le reconnaît.''
Et paradoxalement, cette connerie ne l’empêche pas toujours de réussir, voire d’être populaire. Parler fort pourra être pris, à tort, pour de la maitrise, l’arrogance pour de la compétence et du leadership. Il sait aussi, souvent, flatter ses supérieurs et se faire bien voir.
Mais son action est fondamentalement délétère : elle abîme la coopération, la confiance, l’ambiance, et ce d’autant plus que l’intéressé est insensible aux feedbacks et aux évidences.
Ce profil devient franchement toxique lorsqu’il cumule les traits de ce que la psychologie appelle la triade noire (‘’Dark Triad’’) :
➡️ Narcissisme : égocentrisme et besoin d’admiration
➡️ Machiavélisme : manipulation et instrumentalisation
➡️ Psychopathie : impulsivité et absence d’empathie
Il vous arrive certainement d’en croiser, et plus souvent des hommes que des femmes.
▶️ Faut il incriminer le pouvoir qui tendrait à rendre con ?
Pas forcément. Certains s’y bonifient, voire s’y révèlent. Certes les recherches montrent que le pouvoir tend à éloigner et à réduire l’empathie... Mais comme le souligne Robert Sutton (Harvard), auteur de The No Asshole Rule (Objectif Zéro Con), ‘’le pouvoir incite à la désinhibition et favorise ainsi la révélation de la vraie Personnalité’’, c’est-à-dire de la connerie préexistante.
D’où l’importance, par une bonne gouvernance et une culture d’entreprise saine, de les détecter (feedback, 360°, “dark sides” des évaluations Hogan) … et de les mettre hors d’état de nuire.